[dropcap]C[/dropcap]her journal,
Voici maintenant 2045 jours que nous sommes confinés ! Le temps commence à se faire long et toujours pas de vaccin Covid-19 à l’horizon. Après m’être mise au yoga, avoir pris des cours de mandarin et avoir revisionné l’intégrale de Game of thrones, avec la nostalgie de l’époque où c’était encore une bonne série, je me tourne à présent vers les réseaux sociaux !
Nouvelle, ou plutôt énième réaction Facebook spéciale Confinement. Après l’emoji pendu qui avait fait le buzz, nous découvrons avec stupéfaction l’emoji balle dans la tête. Les médias américains s’interrogent d’ailleurs sur l’état d’esprit actuel de Mark Zuckerberg.
Côté Twitter, la plateforme qui a été rachetée par Donald Trump, réélu à 85% des voix, sert d’exutoire à ce dernier. Suite à l’augmentation du nombre de caractères, qui passe à présent à 2000, il utilise son espace de parole préféré comme lucarne. Ses propos totalement fantasques de soigner le Covid-19 à l’esprit de sel, agitent encore une fois la twittosphere et font les choux gras de la presse.
Sur Instagram, les influenceuses ne savent plus quoi inventer. Maintenant qu’elles ont dévoilé les visages de leurs enfants, qu’elles ont épuisé tout leur stock de photos de l’époque où nous étions libres et qu’elles se sont crêpé le chignon à plusieurs reprises, certaines se tournent vers l’IGTV Réalité. L’émission du moment « El Covid wela 3djouzti » remporte d’ailleurs un franc succès.
Lassée d’entendre parler de Corona virus, je me décide enfin à ouvrir un compte Tik Tok. Force est de constater que la plateforme est aujourd’hui envahie par les moins de 10 ans, qui dansent, chantent et donnent des conseils sur comment devenir influenceurs, forts de leur longue expérience dans le domaine.
J’essaye tant bien que mal de regarder des vidéos sur YouTube pour me détendre. Mais ayant une connexion Algérie Télécom et la résolution HD étant de plus en plus élevée sur la plateforme, je ne distingue malheureusement qu’un nuage de points.
Je m’ennuie, je déprime, je ne sais plus quoi faire. J’en parle à mon tout petit entourage, en leur demandant si je ne devrais pas faire une téléconsultation avec un psychologue,comme le conseille Beauty’s Sirine, 8 ans, sur Tik Tok. Mon père ouvre alors sa bibliothèque et sort un objet poussiéreux que je n’avais pas vu depuis des années : un livre ! Je suis au début réticente, mais très vite me plonge à corps perdu dans le périple d’Ulysse pour rentrer chez lui et retrouver sa bien aimée.
Je me sens mieux. Le Covid-19 quitte mes pensées le temps de ma lecture. Très vite j’entame un autre bouquin, puis un autre. Je délaisse petit-à-petits les réseaux et voyage de livre en livre, d’histoire en histoire. Ayant enrichi mon vocabulaire grâce à mes lectures, je me mets moi aussi à l’écriture. Je tiens à raconter à mon fils ce pan de l’histoire qu’il aura lui-même vécu sans s’en rendre compte. Je souris à l’idée que d’ici qu’il me lise, La3djouza aura eu la peau de sa belle-fille, Beauty’s Sirine tentera de lancer sa fille sur le nouveau réseau social à la mode et les baby-influenceurs fleuriront comme des champignons.
Heureusement pour mon fils, maman aura gardé les livres poussiéreux de papy, dans le cas où il prendrait encore l’envie à quelqu’un de manger une chauve-souris ou un pangolin !!!